L’agrivoltaïque (ou agrivoltaïsme) est une technique qui consiste à mêler production d’énergie renouvelable et agriculture. C’est une manière de lutter contre l’artificialisation des sols. Cela œuvre aussi à la transition énergétique, tout en assurant un haut rendement agricole.
Cette technique pourrait-elle donc constituer l’agriculture de demain ? Quels sont ses avantages, ses enjeux et ses perspectives d’avenir ?
Qu’est-ce que l’agrivoltaïque ?
L’agrivoltaïque est né dans les années 1980. À partir des années 2000, il a été mis en œuvre à grande échelle en Asie puis en Europe. Il existe plusieurs techniques agrivoltaïques. La plus répandue consiste à couvrir certaines cultures (fruits et légumes, vignes…) d’une toiture amovible composée de panneaux photovoltaïques. Le but est de transformer l’énergie solaire en électricité.
Ces panneaux solaires photovoltaïques ont un double usage. Ils protègent les cultures contre les intempéries ou l’exposition au soleil. Et ils évitent en plus l’artificialisation d’hectares de terres destinées uniquement à l’installation de panneaux photovoltaïques.
Si l’agrivoltaïque en est encore à ses balbutiements, son développement paraît prometteur. L’association France Agrivoltaïsme a ainsi été créée par les entreprises Sun’Agri et REM Tec. Ces entreprises sont les pionnières du secteur. Leur but est de faire connaître cette pratique et de la développer de manière pérenne.
Le déploiement à grande échelle de l’agrivoltaïque pourrait en effet contribuer à l’atteinte des objectifs fixés dans les Programmations pluriannuelles de l’énergie (PPE), destinés à piloter la politique énergétique française. Et à s’engager plus sérieusement dans la transition énergétique. Sachant qu’en France, les énergies renouvelables représentent pour l’instant 16,3 % de la consommation d’énergie.
Quels sont les avantages de l’agrivoltaïque ?
L’agrivoltaïque possède de multiples avantages. Les panneaux aident à protéger les cultures des rayons du soleil, de la pluie, du gel et de la grêle. Lorsque des périodes de sécheresse ont lieu, les terres bénéficient d’un ombrage suffisant pour limiter l’augmentation de la température des sols. Cela permet d’éviter de trop fortes pertes, tout en réduisant la consommation en eau des terres.
Ainsi, des expériences ont montré que l’agrivoltaïque pouvait réduire la consommation d’eau d’environ 20 %. La présence de panneaux permet en effet de réduire l’évapotranspiration (c’est-à-dire la perte en eau des plantes). Protégés, les végétaux voient leurs besoins en eau diminuer jusqu’à 34%. D’autres expériences ont par ailleurs révélé que le rendement agricole était supérieur dans les projets agrivoltaïques, par rapport aux cultures classiques.
Ensuite, les panneaux photovoltaïques installés dans les champs permettent de produire de l’électricité, sans que les terres cultivables ne soient artificialisées (c’est-à-dire transformées) pour le seul aménagement de ces panneaux.
Enfin, la quantité d’eau et le besoin en ensoleillement des plantes étant pris en compte pour déterminer l’inclinaison des panneaux, la qualité des cultures s’en ressent.
En somme, l’agrivoltaïque permet d’améliorer les rendements agricoles. Dans le même temps, il valorise les terres et développe les énergies renouvelables via la production d’électricité photovoltaïque.
Quels sont les enjeux de l’agrivoltaïque ?
Depuis quelques années, la volonté de développer les énergies renouvelables au sein du secteur agricole se fait plus forte, d’autant que la loi de transition énergétique de 2015 fixe des objectifs précis en la matière (notamment : porter la part des énergies renouvelables à 32 % de la consommation finale brute d’énergie en 2030). C’est dans ce cadre que le photovoltaïque devrait se développer.
Le 10 février dernier, le président Emmanuel Macron a par ailleurs annoncé vouloir dépasser l’objectif de 100 GW de capacités photovoltaïques en France d’ici à 2050, en développant notamment les projets dans l’agrivoltaïsme.
À ce titre, on peut citer à nouveau le programme Sun’Agri. Le programme développe depuis plusieurs années des solutions de transition énergétique pour répondre aux problématiques agricoles. Le principe : installer des panneaux photovoltaïques sur deux niveaux. L’étage bas étant dédié à la plante, et l’étage supérieur à la production d’électricité. Ce programme pionnier à destination des agriculteurs bénéficie du soutien de l’Etat.
Alors que le dernier rapport du GIEC nous invite à développer autant que possible les énergies renouvelables et à diminuer drastiquement notre recours aux énergies fossiles, et que la nécessité de passer à un modèle d’agriculture plus vertueux se fait pressante, le photovoltaïque pourrait bien faire partie des solutions possibles.
Et demain ? Les perspectives d’avenir de l’agrivoltaïque
Depuis 2017, les agriculteurs désireux d’expérimenter cette technologie peuvent solliciter des subventions pour développer l’agrivoltaïque. Et cela dans le cadre de l’appel d’offres innovation de l’État opéré par la Commission de régulation de l’énergie (CRE).
Des projets de certification et de labellisation sont par ailleurs en cours pour développer l’agrivoltaïque et renforcer la confiance des professionnels du secteur à l’égard de cette solution nouvelle. De son côté, l’Agence de la transition écologique (ADEME) travaille sur une réglementation de l’agrivoltaïque. Le secteur est encore peu balisé.
Enfin, le Sénat, qui travaille actuellement au développement et la pérennisation de la filière agrivoltaïque en France, propose que les projets agrivoltaïques bénéficient des aides de la PAC (Politique agricole commune), ce qui n’est pas le cas actuellement en raison de leur caractère “innovant”. De telles aides pourraient aider la filière à se développer rapidement.
De toute évidence, l’agrivoltaïque est l’une des solutions pour préserver le secteur de l’agriculture des conséquences néfastes du réchauffement climatique : sécheresses, intempéries, gel… Si elle n’est évidemment pas le seul outil disponible en matière de transition écologique, énergétique et de développement durable, elle s’impose comme une solution d’avenir, qu’il appartient désormais au gouvernement de développer dans les prochaines années.
Cependant, il est important de souligner que l’agrivoltaïque n’en est encore qu’au stade de l’expérimentation (en Europe tout du moins). Les performances de cette technologie, notamment sur le long terme, ne sont donc pas garanties, même si les premiers résultats sont très encourageants.
Certains agriculteurs craignent en outre que l’agrivoltaïque ne soit plus profitable à la production d’énergie qu’aux rendements agricoles proprement dits. Le développement de ce système dans les années à venir devrait, à n’en pas douter, permettre de se faire une idée plus précise sur la question.