Né dans les années 1960, le modèle de l’agriculture intensive est aujourd’hui décrié pour son caractère polluant et destructeur. Il représente en effet un quart des émissions de gaz à effet de serre mondiales, et participe à la disparition du vivant.
C’est en opposition que s’est construite l’agriculture durable, un modèle qui se veut à la fois viable et respectueux de la nature. Mais de quoi s’agit-il exactement ? En quoi consiste l’agriculture durable ? Quels sont ses enjeux, et comment les consommateurs peuvent-ils agir pour promouvoir ce nouveau modèle ?
L’agriculture durable, c’est quoi ?
Comme son nom l’indique, l’agriculture durable se fonde sur le concept de développement durable, dont l’objectif est de “répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs” (rapport Our Common Future, ONU, 1987) .
À ce titre, elle promeut un système dans lequel les ressources prélevées ont le temps de se régénérer.
L’agriculture durable repose sur les 3 piliers du développement durable : la viabilité économique, le social et l’écologie.
Son objectif est à la fois simple et complexe : nourrir la population, tout en limitant l’impact colossal de l’agriculture sur l’environnement.
Une agriculture durable est donc une agriculture responsable tout en étant pérenne, par opposition à une agriculture productiviste qui recourt aux engrais chimiques et aux pesticides, en fragilisant non seulement l’environnement mais aussi la santé humaine.
Quels sont les enjeux de l’agriculture durable ?
Aujourd’hui en France, l’agriculture émet 21% des émissions directes de gaz à effet de serre et 97% des émissions d’ammoniac (source : ADEME, 2015).
Le secteur émet 53% des émissions totales de poussières en suspension, ce qui contribue à la pollution de l’air. Les pratiques agricoles contemporaines contribuent également à l’érosion des sols.
Or, à l’heure où la lutte contre le réchauffement climatique doit s’intensifier, il n’est plus possible d’ignorer les conséquences d’une agriculture intensive, qui place le rendement au-dessus de la protection de l’environnement.
À quels enjeux l’agriculture durable doit donc répondre ?
- La réduction des engrais azotés (fabriqués à partir de l’ammoniac et sources importantes de pollution), et l’arrêt de l’épandage des pesticides ;
- La préservation de la biodiversité ;
- L’adoption d’une meilleure gestion des ressources, notamment de l’eau (l’un des principes de l’agriculture durable est de réutiliser l’eau de pluie pour éviter de pomper dans les nappes phréatiques) ;
- La lutte contre les monocultures qui contribuent à appauvrir les sols.
L’un des objectifs en matière d’agriculture durable est de nourrir une population mondiale grandissante (l’ONU estime le nombre d’êtres humains sur Terre en 2050 à 9,6 milliards), tout en limitant son impact sur l’environnement et en assurant sa pérennité.
Un vœu pieux ? Contrairement à ce qu’on pourrait penser, les projets d’agriculture durable tendent à avoir de meilleurs rendements que ceux qui se basent sur un modèle agricole classique.
En France, en juillet 2022, 29 898 exploitations agricoles étaient certifiées Haute Valeur Environnementale, ce qui correspond à + 56 % en un an (+ 10 700 exploitations).
Cela représente environ 7,7 % des exploitations agricoles. La certification Haute Valeur Environnementale correspond au niveau le plus élevé de la certification environnementale des exploitations agricoles. Elle est basée sur quatre thématiques environnementales :
- La protection de la biodiversité,
- La réduction de l’utilisation des pesticides,
- La gestion de la fertilisation,
- La gestion de l’eau.
Dans les années à venir, le nombre d’exploitations agricoles qui se basent sur les principes de l’agriculture durable devrait encore augmenter. Pour l’instant, cependant, elles restent à la marge d’un système productiviste.
Comment l’agriculture durable peut-elle aider à lutter contre le changement climatique ?
L’agriculture est l’une des causes du réchauffement climatique. En prenant en compte la déforestation, elle est en effet responsable d’un quart des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
Or, et c’est un véritable paradoxe, le dérèglement climatique menace les rendements agricoles et la souveraineté alimentaire mondiale.
Ces dernières années n’ont pas été avares en exemples, que ce soit en France ou ailleurs dans le monde : vagues de chaleur et sécheresses, précocité des vendanges, destruction des récoltes en raison des canicules et/ou des incendies… D’ailleurs, selon le GIEC, les pertes de récoltes liées aux sécheresses auraient triplé ces 50 dernières années en Europe.
Dans les décennies à venir, les événements climatiques inhabituels risquent de devenir de plus en plus fréquents et d’entraîner des sécheresses importantes, une forte salinisation des terres, une prolifération des parasites, ou encore des variations imprévisibles et aléatoires de la pluviosité.
En utilisant moins d’intrants chimiques et plus de méthodes naturelles, en diversifiant les paysages agricoles (par opposition aux monocultures), en utilisant les ressources naturelles de manière responsable, en minimisant la production de déchets, en respectant le bien-être animal, et en utilisant les déchets verts comme biomasse pour créer de l’énergie, l’agriculture durable permet donc de lutter contre le réchauffement climatique.
L’un des enjeux de ces prochaines décennies sera alors d’en assurer le développement partout dans le monde.
Comment les consommateurs peuvent-ils soutenir l’agriculture durable ?
Certes, pour avoir un véritable impact, le changement doit être réalisé au niveau systémique (passage d’un modèle intensif et productiviste à un modèle durable et respectueux de l’environnement).
Mais cela ne signifie pas que les consommateurs n’ont aucun rôle à jouer. Au contraire : leur soutien à une agriculture durable permet de promouvoir ce type de modèle.
Le rapport « L’heure des comptes pour les supermarchés », publié le 2 février 2023 par le Réseau Action Climat (RAC) qui rassemble plusieurs associations de lutte contre le réchauffement climatique, montre que le secteur de la grande distribution est encore bien loin de proposer une alimentation durable. Or, il représente aujourd’hui 70 % de la consommation alimentaire en France. Les consommateurs peuvent donc, en modifiant leurs habitudes, être vecteurs d’un changement à plus grande échelle.
Voici quelques moyens simples de soutenir l’agriculture durable :
- Manger local et de saison, bio si possible (en achetant directement aux producteurs, via des plateformes comme La Ruche qui dit Oui ou Frais et Local).
- Consommer moins de produits transformés qui ont une empreinte environnementale négative, et cuisiner des aliments bruts.
- Réduire sa consommation de viande, d’œufs et de produits laitiers. Selon Greenpeace, diviser par deux son apport de protéines animales permettrait de dégager de la nourriture pour deux milliards de personnes supplémentaires !
- Faire attention au gaspillage, qui représente 10 millions de tonnes par an rien qu’en France.
- Éviter, quand c’est possible, le recours aux supermarchés et à la grande distribution en général.