Afin d’atteindre les objectifs de l’Accord de Paris pour le climat, le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (UNEP) estime que nous devrions réduire nos émissions de CO2 de 7,6 % par an. Afin d’y parvenir, le captage et le stockage du CO2 semble être une option intéressante. De quoi s’agit-il ? On capture le CO2 émis par une installation industrielle puis on l’enfouit dans le sous-sol ou on le valorise, afin d’éviter qu’il ne soit rejeté dans l’atmosphère. Comment fonctionne cette technique ? Comment est-elle appliquée ?
Capter et stocker le CO2 pour réduire nos émissions de CO2
Afin de réduire nos émissions de gaz à effet de serre, pourquoi ne pas empêcher nos émissions de CO2 de partir dans l’atmosphère ? Pour ce faire, il faut donc le capter à la source puis le stocker, généralement dans le sous-sol. Il y a donc de plus en plus de recherche autour des solutions de CSC (Captage et Stockage de CO2).
Il s’agit actuellement d’une des solutions privilégiées par l’Agence internationale de l’énergie pour réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le monde. Actuellement, on compte une vingtaine de projets à échelle industrielle sur la planète. Pour tenir nos objectifs environnementaux, il en faudrait 100 fois plus d’ici 2050.
L’Agence internationale de l’énergie estime que le captage et le stockage du CO2 pourrait contribuer à hauteur de 7 % aux réductions d’émissions dans le scénario avec une hausse de deux degrés d’ici 2040. Elle classe les solutions de CSC comme la 3e priorité, après l’efficacité énergétique et le développement des énergies renouvelables.
Actuellement, 30 à 40 millions de tonnes de CO2 sont déjà captées chaque années dans le monde. Mais le coût de ces techniques freine leur développement. En effet, capter une tonne de CO2 dans une centrale à gaz coûte 15 € mais ce prix peut atteindre les 100 € par tonne sur un site sidérurgique et les 120 € dans une cimenterie. Afin que les solutions de captage et de stockage soient déployées à plus grande échelle, il faut donc que la filière devienne plus compétitive sur le plan économique.
Le captage du CO2
On peut capter le CO2 émis par des installations particulièrement polluantes : des centrales au charbon, au gaz ou au fioul, des usines pétrochimiques ou sidérurgiques, des raffineries de pétrole, ou encore des cimenteries.
Trois techniques de captage sont utilisées :
- Le captage postcombustion : il s’agit de la technique la mieux maîtrisée. On utilise un solvant chimique liquide pour séparer le CO2 de la fumée émise. Ce solvant se lie au CO2 et on peut ensuite extraire ce duo, puis les séparer. Cette technique est particulièrement avantageuse car elle peut être utilisée sur des installations existantes.
- Le captage précombustion : avec cette technique, on décarbone le combustible avant même qu’il ne soit brûlé. Elle est déjà utilisée à l’échelle industrielle, mais on ne peut effectuer cette opération que sur des sites industriels qui ont été conçus en accord avec cette technologie.
- L’oxycombustion : avec cette technique de captage du CO2, on brûle le combustible avec de l’oxygène pur, ce qui facilite ensuite la captation du CO2. En revanche, il faut séparer l’oxygène des autres composants de l’air au préalable.
Toutes ces techniques impliquent de devoir séparer le CO2 des autres composants présents dans les fumées. En réalité, le dioxyde de carbone ne représente que 3 à 15 % des fumées, il n’est donc pas possible de stocker l’intégralité des fumées émises, ceci ferait exploser les besoins de stockage.
Le transport du CO2
Une fois le dioxyde de carbone capturé, il est comprimé jusqu’à ce qu’il atteigne un état presque liquide. Il est ensuite transporté jusqu’à ce qu’on puisse le stocker. Cette opération est généralement réalisée grâce à des pipelines, des canalisations, des bateaux ou encore des véhicules. Globalement, on utilise des techniques similaires à celles utilisées pour le transport du gaz naturel. Elles sont donc assez maîtrisées.
Comment entreposer le CO2 ?
Il existe plusieurs façons de stocker le CO2 dans le sous-sol terrestre. On peut notamment l’injecter dans des fonds océaniques. Mais plusieurs techniques posent des questions sur le plan environnemental. En effet, il existe un risque de dérèglement des écosystèmes naturels.
C’est pourquoi une autre technique est surtout privilégiée. Il s’agit du stockage géologique. De quoi s’agit-il ? On injecte le CO2 dans des réservoirs d’hydrocarbures vides ou dans des réservoirs d’eau profonds, impropres à la consommation. Ce sont ces derniers qui offrent la plus grande capacité. En effet, les réservoirs d’hydrocarbures vides ne permettraient de stocker qu’une quantité de CO2 inférieure à 1 milliard de tonnes.
Des débuts d’application concrète
Aux États-Unis, Total et d’autres partenaires sont en train de mener un projet d’envergure dans l’univers du stockage de dioxyde de carbone. En janvier 2020, ils ont annoncé le lancement d’un premier projet d’études visant à évaluer si une installation de stockage de CO2 à ampleur industrielle serait viable tant sur le plan économique que technique. Ainsi, une première infrastructure de test va être installée dans une cimenterie du Colorado. Elle devrait permettre de capter chaque année 750 000 tonnes de CO2, avec un coût réduit de moitié par rapport aux autres techniques de stockage existantes.
Mais ce projet est critiqué. En effet, Total souhaite injecter ce dioxyde de carbone dans des gisements pétroliers afin d’en augmenter la pression. Ceci leur permettrait alors d’extraire davantage de pétrole.
En Norvège, Total, Shell et Equinor ont également lancé un autre projet d’envergure. Ce site pourrait devenir le premier à recevoir du CO2 provenant de différents pays européens. Pour l’instant, le CO2 capté proviendra de deux sites industriels situés à proximité d’Oslo. Ensuite, le dioxyde de carbone sera transporté pour être injecté dans des poches d’hydrocarbures épuisées au fond de la mer du Nord. On pourrait alors capter 800 000 tonnes de GES par an, avec une capacité totale de 5 millions de tonnes. Le projet est encore à l’étude pour une première injection potentielle en 2024.
Le captage et le stockage du CO2 dans les transports
En réalité, on pourrait aussi envisager d’appliquer les techniques de captage et de stockage du CO2 dans d’autres univers que l’industrie lourde. Par exemple, des chercheurs Suisses ont notamment développé une technologie qui permettrait de diminuer les émissions de carbone des poids lourds.
Comment ça marche ? Le CO2 est capté directement au niveau du pot d’échappement. Il est ensuite liquéfié par des turbocompresseurs utilisant la chaleur du moteur du véhicule. Dès qu’il est à l’état liquide, le dioxyde de carbone est stocké dans un réservoir situé sur le toit du véhicule. Il peut ensuite être transformé en carburant conventionnel. Ainsi, près de 90 % des émissions de gaz à effet de serre d’un poids lourd pourraient être revalorisées. Cette piste est donc particulièrement intéressante pour la neutralité carbone du secteur des transports.
Ainsi, on voit que le captage et le stockage du CO2 est une technologie qui ouvre des pistes intéressantes mais qui doit encore trouver un modèle économique viable, tout en limitant son impact sur l’environnement. Actuellement, une tonne de CO2 évitée revient à environ 20 € contre 100 € pour le captage et le stockage du CO2 émis par un site sidérurgique.
Une autre voie est également explorée actuellement : le captage du CO2 par des microalgues, particulièrement gourmandes en dioxyde de carbone. Un démonstrateur est notamment en cours d’installation dans une cimenterie en Isère.
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