Actuellement, le gaz naturel représente 20 % du total de l’énergie consommée en France et 20 % de ses émissions de gaz à effet de serre. Pour réduire cet impact sur l’environnement, la Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE) a des objectifs ambitieux. En effet, l’objectif de la France est que le biométhane représente 7 % de tout le gaz consommé en France en 2030. Mais qu’est-ce que ce gaz renouvelable ? Comment le produit-on ? Et quels sont encore les challenges à relever par cette filière ? Découvrez-le dès maintenant.
Le biométhane, qu’est-ce que c’est ?
Le biométhane est un gaz renouvelable produit à base d’intrants agricoles, de boues d’épuration et de déchets ménagers. Il possède des propriétés identiques à celles du gaz naturel et peut donc le remplacer, tout en ayant moins d’impact sur l’environnement. On peut l’utiliser exactement de la même façon : pour se chauffer, pour cuisiner, mais aussi pour faire fonctionner certains véhicules.
Ainsi, il est perçu comme très prometteur dans le monde des énergies renouvelables. Le cabinet de conseil Carbone 4 le qualifie même de “nouvel or vert du monde rural”. Pourquoi un tel enthousiasme ? Il permet notamment aux agriculteurs d’obtenir un complément de revenu, tout en valorisant les déchets.
La Stratégie nationale bas carbone mise en tous cas fortement sur le biométhane. En effet, elle envisage que la production passe d’1 TWh en 2018 à 200 TWh d’ici 2050.
Les trois générations de biométhane
Il existe trois générations de biométhane. Voici comment elles fonctionnent.
Le biométhane de première génération
Le biométhane de première génération correspond à ce que l’on appelle la méthanisation. Pour obtenir du gaz, on concentre des déchets qui fermentent dans un méthaniseur, un espace sans oxygène, tout en étant mélangés et chauffés.
Suite à ce processus qui dure environ 3 semaines, on produit alors un digestat qui peut être utilisé comme engrais, ainsi que du biogaz qui peut être directement utilisé sous forme d’électricité et/ ou de chaleur. Il est aussi possible d’épurer ce biogaz pour en faire du biométhane, que l’on peut ensuite utiliser comme du gaz naturel.
Différents types de déchets peuvent être utilisés pour fabriquer du biométhane : des pelures de fruits et légumes, des restes de repas, des restes de tonte de pelouse, des résidus de culture (feuilles, branches, etc.), du lisier, du fumier, des graisses animales, du lactosérum ou encore des bassins d’épuration.
Il s’agit de la seule filière biométhane actuellement mature en France. C’est celle-ci qui est en train de se déployer à l’échelle industrielle dans le pays.
Le biométhane de deuxième génération
Le biométhane de deuxième génération peut être produit de deux façons. La première méthode de production est la pyrogazéification. Il s’agit de la décomposition chimique sous l’effet de la chaleur (procédé appelé pyrolyse) de biomasse ligneuse (comme du bois). Elle est suivie d’une étape de gazéification oxydante. Après épuration et méthanisation du gaz obtenu, on a alors du biométhane. Cette technologie est encore en phase de tests.
La deuxième méthode de production est le power-to-gas. Il s’agit de la transformation d’électricité en gaz. Comment faire ? Ce procédé repose sur l’électrolyse, c’est-à-dire la transformation de l’eau en hydrogène grâce à l’utilisation d’électricité. L’hydrogène produit peut ensuite être injecté dans le réseau directement ou combiné à du CO2, ce qui permet d’en faire du biométhane. Cette technologie est mature mais pas encore économiquement rentable. Les spécialistes s’accordent pour dire qu’elle devrait être utilisable à grande échelle dès 2030.
Le biométhane de troisième génération
Produire du biométhane de troisième génération est encore un procédé considéré comme plus prospectif. En effet, la technologie n’est pas encore mature.
De quoi s’agit-il ? On commence par cultiver des microalgues dont on se sert ensuite pour nourrir les digesteurs, utilisés dans la méthanisation de première génération. On produit ensuite de l’énergie de la même façon que pour cette dernière.
À Poissy, un puits de carbone a notamment déjà été installé. Il permet d’absorber la même quantité de CO2 que 50 arbres. Cet appareil cylindrique mesure environ 2 mètres de haut. Il capte les particules polluantes avec le processus de photosynthèse des micro-algues. Ces dernières peuvent ensuite être utilisées comme matière première pour produire du biométhane. Il s’agit de la troisième expérimentation de ce type en France.
Transformer le biogaz en biométhane
Pour injecter le biogaz obtenu dans le réseau national, il faut l’épurer. On le transforme donc en biométhane en le débarrassant de toutes ses impuretés. Comment faire ? Le biogaz est décarboné pour enlever le CO2 qu’il contient et ne plus conserver que le méthane, il est désulfuré pour en retirer le sulfure d’hydrogène et on le déshydrate pour en enlever l’eau. On obtient alors du biométhane.
Un autre dispositif existe, appelé la WAGABOX. Cette technologie permet de valoriser le biogaz qui est produit naturellement dans les stations d’épuration, avec deux procédés de transformation. Tout d’abord, le biogaz est filtré par des membranes. Ceci permet d’enlever le CO2 et les impuretés contenues dans le biogaz. Le gaz est ensuite refroidi à une température cryogénique afin de séparer le méthane de l’oxygène et de l’azote. On obtient alors du biométhane, que l’on peut injecter directement sur le réseau de gaz.
Les points forts du biométhane
Le biométhane possède des atouts intéressants. Tout d’abord, il permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le biométhane injecté sur le réseau émet 90 % de CO2 en moins que le gaz naturel si on prend en compte l’intégralité de la chaîne de valeur. En effet, il génère 40 % d’émissions en moins par rapport à l’extraction et la combustion de gaz naturel et 50 % d’émissions en moins par rapport au stockage de déchets agricoles en plein air.
La production de biométhane permet également de valoriser les déchets et de les transformer en ressources. Et ceci permet de considérer le biométhane comme une énergie renouvelable, contrairement au gaz naturel.
Enfin, la méthanisation permet aussi de produire de l’engrais. Cet engrais naturel peut remplacer les autres engrais chimiques. Ainsi, on peut transformer jusqu’à 95 % des déchets en fertilisants, ayant un effet bénéfique sur le sol car ils sont naturels. Avec la méthanisation, on réduit également l’impact environnemental lié à la fabrication d’engrais chimique. En effet, pour fabriquer 1 kg d’engrais chimique, on produit 7 kg de CO2.
La filière biométhane en France
En 2017, on comptait 700 sites de méthanisation en France, contre 1700 en Italie et surtout 11 000 en Allemagne. Mais l’hexagone mise massivement sur ce mode de production d’énergie et la filière biométhane connaît désormais une forte croissance dans le pays.
Les sites de production de biométhane
En France, la méthanisation est effectuée sur plusieurs types de sites. La majorité des unités de production sont des installations individuelles d’agriculteurs, de petite taille, produisant du biométhane à partir de leurs déchets.
On peut également rencontrer d’autres types d’unités de production de biométhane :
- Les groupements d’agriculteurs qui produisent collectivement du biométhane
- Les installations industrielles qui utilisent des intrants agricoles et des déchets agro-alimentaires
- Les stations d’épuration
- Les installations de stockage de déchets
La valorisation du biométhane
Généralement, lorsque l’on produit du biométhane, il s’agit d’une cogénération : on produit à la fois de l’électricité et de la chaleur, utilisées localement. C’est le cas pour 75 % des installations en France aujourd’hui. Ainsi, seules 10 % des installations de production de biométhane injectent leur production sur le réseau national d’énergie.
Les pouvoirs publics cherchent à inverser cette tendance, avec une injection plus conséquente sur le réseau national. Pourquoi une telle volonté ? Il s’agit du seul levier existant pour décarboner le gaz utilisé à l’échelle du pays et améliorer notre indépendance énergétique, en important moins de gaz de pays comme la Russie, par exemple.
À l’horizon 2030, 85 % des gisements de matière première pour la biométhanisation devraient être de nature agricole. Ainsi, les installations autonomes d’agriculteurs individuels ou regroupés vont devoir connaître un important développement pour que la France atteigne les objectifs fixés.
Pour encourager la croissance de la méthanisation, l’Etat a mis en place un tarif d’achat spécifique pour le gaz injecté sur le réseau, dès 2011. Pourquoi une telle mesure de soutien ? Actuellement, les coûts de la filière ne sont pas encore optimisés, avec un coût de production autour de 90 €/MWh, alors que le coût de production du gaz naturel tourne autour de 25 €/MWh.
Ainsi, on voit que la filière biométhane connaît une forte croissance en France. En effet, le nombre de sites de production a augmenté de 65 % par an en moyenne entre 2015 et 2018. La capacité a, quant à elle, augmenté de 63 % par an en moyenne sur la même période.
Une filière qui rencontre encore des défis
Même si la filière biométhane est prometteuse, elle rencontre encore certains freins. Tout d’abord, elle est confrontée à des difficultés de financement. En effet, des investissements conséquents sont nécessaires pour mettre en place une installation de production de biométhane.
L’acceptabilité locale peut également poser problème dans certains cas. La faute souvent à des idées reçues pas vraiment justifiées. Ainsi, il y a un vrai besoin d’information des riverains au sujet de la production de biométhane. Le cabinet de conseil Carbone 4 recommande également la mise en place de campagnes de financement participatif dans une étude dédiée à la filière. Elles permettent selon l’enquête de mieux impliquer les riverains dans les projets.
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